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Catégorie : Personnalités (photo)
Rubrique personnalités de la photoPhotographe itinérante et passionnée, Caroline Elbaz éprouve pour l'Inde une attraction particulière et consacre à ses danses classiques un travail particulier qu'elle expose à la Péniche Anako du 7 au 25 février. Une excellente occasion de mieux faire connaissance avec elle et de partager quelques uns de ses secrets de photographe de terrain grâce à quelques questions que nous lui avons posées...

Indeaparis.com : Bonjour Caroline Elbaz. Quelle est votre expérience de l'Inde ?

Caroline Elbaz : Cela fait 20 ans que je pars en Inde une fois par an. Je n’ai pas compté le nombre de séjours passés là-bas mais ils furent nombreux... Je suis allée la première fois en Inde en commençant par la Khumba Mêla à Allahabad où il y avait 12 millions de pèlerins ! Je participai à un stage de photojournalisme animé par Jean-Louis Chabassud. Depuis ce choc de l’Inde, j’ai toujours voulu y retourner, et, à chacune de mes rencontres, je me sentais vraiment bien dans ce pays. C’est quelque chose que l’on éprouve, cela se raconte difficilement avec des mots, cela se vit. On ne reste jamais indifférent à ce pays. Plus tard, je comprendrai que j’y ai certainement vécu dans une ancienne vie... Depuis j’ai sillonné ce pays de long en large. Seule d’abord, à la recherche de belles images, j’ai adoré les côtes de Malabar, les capitales du sud les villages alentours, Pondichéry. J’y ai ramené des images des tribus de l'Andhra Pradesh, de la coupe des cheveux du temple de Tirumalai, des femmes Gourous... A chaque voyage je me mêlai à la vie des habitants. En fait, je n’étais jamais seule, d’ailleurs la notion de solitude existe peu en Inde à part chez les Sadhous renonçant. Je me suis toujours intéressée à l’humain, à ses conditions de vie, laissant une grande ouverture aux rencontres et il y en a eu de superbes ! Cela ferait l’objet d’un livre.

Plus tard, avec celui qui allait devenir mon époux, également photographe, nous restions à chaque fois suffisamment longtemps pour arpenter de nouveau horizons... Darjeeling, Shillong au Méghalaya, Imphal au Manipur... C’était une véritable aventure de découvrir que, dans cet immense pays, nous étions toujours surpris, l’œil aux aguets et nous nourrissant d’une richesse culturelle extraordinaire. A Calcutta nous avons rencontré Mère Teresa, à Bombay J.R.D Tata, et même le petit serveur de thé a été pour nous une révélation divine ! C’est cela en fait : on ne peut que se sentir humble face à cette immensité !

Q : Pourquoi l'Inde vous séduit-elle tant ?
R : Les aspects qui me motivent concernent d’abord le sens inné des indiens pour les couleurs, cette harmonie qui est partout alors que les rues et les lieux peuvent être parfaitement immonde de saleté. Il y a toujours une touche de beauté quelque part : une écolière traversant la rue avec sa tresse de fleurs fraîches, le vendeur de cannes à sucre qui a aligné sa marchandise tel un orfèvre, la beauté de la couleur d’un sari, une façon de se tenir. Bref nous ne pouvons qu'être en éveil si l’on est un peu curieux du monde qui nous entoure. C’est la même sensation pour les odeurs, on peut passer d’un extrême à l’autre en quelques secondes, rien n’est jamais acquis : n’est-ce pas aussi cela la vie ?!

Véronique Azan photographiée par Caroline Elbaz
Véronique Azan photographiée par Caroline Elbaz


Q : Argentique ou numérique ?
R : Toutes les photographies réalisées avant 2009 ont été faites en argentique. Depuis, avec l’évolution, nous avons dû nous adapter et, pour une question de rapidité d’information, le numérique est devenu indispensable. Cela ne m’empêche pas de continuer à sortir mon ancien boîtier pour des projets personnels et pour faire du noir et blanc. J’utilise un boîtier reflex D200 (Nikon) avec un zoom grand angle-petit télé mais, comme dirait un grand maître de la photo “en photo on n’est jamais assez près du sujet !”, un trépied est pratique pour ne pas bouger à la tombée du soir. Je conseille aux photographes d’être discret et poli avec les sujets qu’ils prennent en  photo. Généralement les indiens sont bon public mais il est préférable de leur demander l’autorisation, c’est rare qu’ils la refusent. Eviter aussi de photographier les femmes qui se baignent dans les lieux sacrés. Mettez vous toujours à la place de celui que vous photographiez. Dans certains lieux publics, des mendiants attendent une récompense pour la photo, c’est devenu un business pour certains. Dans certains lieux publics, on vous demandera de payer à l’entrée pour l’utilisation de votre appareil ou caméra, c’est une façon pour eux de vendre leurs cartes postales. En tant que professionnels, nous demandons des autorisation préalables.

Q : Parmi tous vos clichés réalisés en Inde quel est celui que vous considérez comme le meilleur ?
R : Mon meilleur cliché ? C’est difficile, car il y a des photos techniques et d’autres ou l’émotion prime ! Bon, alors j’aime beaucoup la photo de l’invitation à mon exposition, c’est Véronique Azan, une grande danseuse de Kathak. Je trouve qu’elle représente bien la danse, elle tourne un peu comme un derviche de façon très élégante, cela pourrait être aussi du flamenco qui puise ses racines dans le Kathak, et puis la couleur de son sari ! C’est une de mes teintes préférées !

Q : Et quels sont vos projets en Inde ?
R : Des projets en Inde ? J’en ai tellement qu’il serait impossible de les citer tous ici ! Mais à très court terme, après le vernissage, je remets mon soulier de verre et m'envole pour de nouvelles aventures en Inde.

Merci pour votre sincérité et nous espérons que ce partage d'une expérience riche et intense en Inde donnera aux nombreux photographes qui nous lisent, l'envie de venir voir votre exposition à la
Péniche Anako et d'organiser très vite la leur pour notre plus grand plaisir...